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CNET France rapporte que les acheteurs dépensent des millions pour des JPEG en raison du NFT


De banales images vendues pour des montant à sept chiffres, des frais de transaction parfois astronomiques mais une technologie porteuse d’avenir. On vous explique tout sur l’incroyable phénomène des NFT.

L’image ci-dessous vaut plus de 9 millions de dollars. Il s’agit d’un NFT (non fungible token ou jeton non fongible), l’un des premiers jamais créés. Il fait partie de la collection CryptoPunks, un ensemble de 10 000 NFT publiés en 2017, à une époque où une grande partie du monde découvrait encore ce qu’était le bitcoin.

Beaucoup de personnes ignorent tout des NFT qui ont commencé à faire beaucoup parler d’eux depuis le printemps dernier. L’idée que des sommes aussi astronomiques puissent être dépensées dans quelque chose d’aussi immatériel a de quoi sidérer. Les détracteurs parlent d’arnaque et d’un phénomène nuisible à l’environnement, d’autres d’une techno porteuse d’avenir. Raison de plus pour tenter d’y voir plus clair et de dépasser les idée reçues.

Un NFT, un simple JPEG ?

VIDEO: Il ACHÈTE des MILLIONS d'€ de NFT, mais.. Pourquoi ? Discussion avec Jean-Michel Pailhon
Crypto Picsou

Un NFT est un objet virtuel dont l’authenticité et la traçabilité sont garanties par une blockchain. Ce type de jeton cryptographique est actuellement très prisé des collectionneurs et amateurs d’art. Ce qui nous ramène à l’image pixellisée ci-dessus. Son propriétaire est Richerd, un développeur de logiciels canadien. Il a commencé à créer des logiciels de cryptomonnaie vers 2013. Après avoir découvert les NFT, Richerd a acheté CryptoPunk #6046 le 31 mars pour 86 000 dollars (75 894€ au cours actuel) ce qui, selon lui, est le plus gros achat qu’il ait jamais fait dans sa vie.

Le mois dernier, il déclaré à ses 80 000 abonnés sur Twitter que son CryptoPunk était inestimable et qu’il n’était pas à vendre, quel que soit le prix proposé. Dès le lendemain, sa détermination a été mise à l’épreuve lorsqu’une offre de 2 500 ethers, soit 9,5 millions de dollars, lui a été faite. Cette proposition record n’a pas été faite parce que le CryptoPunk de Richerd vaut cette somme, des NFT similaires se vendent aujourd’hui environ 400 000 dollars, mais plutôt parce que son bluff a attiré l’attention. C’était un défi tout à fait sérieux. Si Richerd avait cliqué sur « accepter », il aurait effectivement perçu ces 2 500 ethers. Mais il a préféré décliner. « Bien, évidemment, la veille, j’ai dit « Je ne le vends à aucun prix », donc si je le vends à ce prix, j’irais à l’encontre de mon intégrité », a-t-il expliqué à nos confrères de CNET.com. « En plus de cela, j’ai utilisé ce CryptoPunk comme ma photo de profil, comme ma marque. Tout le monde sait que c’est moi. »

Il n’y a pas si longtemps, l’explication de Richerd aurait semblé insensée. Jusqu’à quel point faut-il être déconnecté de la réalité pour offrir une telle somme pour une pauvre image jpeg ? Et à quel point faut-il être scandaleusement malavisé pour refuser un telle proposition ? Après quelques mois à faire des recherches et à suivre les NFT, nous avons compris que cela n’a rien de surprenant. En fait, c’est même tout à fait logique.

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 Les NFT les plus chers du moment via NonFungible, Screenshot par CNET France

Les millionnaires du bitcoin

VIDEO: Les NFTs, il est enfin temps de comprendre! Ft. @AvatArt & @PierreTLambertFR
Nico DT

Premier fait qui explique pourquoi les NFT peuvent s’échanger pour l’équivalent du salaire d’un PDG : on estime que le bitcoin a créé plus de 100 000 millionnaires. Et le fait que les NFT soient devenus un phénomène en mars ne doit rien au hasard. En effet, c’est à ce moment-là que le bitcoin a atteint 60 000 dollars, soit une hausse de plus de 500 % par rapport à six mois auparavant.

Pour la grande majorité des personnes, dépenser des sommes aussi énormes pour un NFT est un non-sens total. Mais pour les happy few qui ont de l’argent à ne savoir qu’en faire, les achats hors-normes sont justement un moyen de se singulariser et d’affirmer leur statut social.

Prenez le Bored Ape Yacht Club, par exemple. Il s’agit d’une collection de 10 000 dessins de singes vendus comme NFT. Ils sont tous dotés de caractéristiques différentes qui en rendent certains plus rares que d’autres. Les exemplaires rares se sont vendus plus d’un million de dollars tandis que les plus communs se négocient environ 200 000 dollars. Au moment du lancement de cette collection en avril, ils valaient 190 dollars pièce. L’objectif principal de ces images est d’être utilisées comme photos de profil sur Discord, Twitter, Instagram ou d’autres plateformes sociales.

De prime abord, cela paraît totalement insensé. Mais si on se replace dans le contexte de la façon dont les gens riches dépensent leur argent, cela devient moins stupéfiant. Pour cette élite qui peut tout s’offrir, seule la rareté la plus extrême est digne d’intérêt. Nous sommes déjà coutumiers des dépenses extravagantes dont les ultra riches sont capables dans le monde réel : propriétés, yacht, voitures, avions, bijoux… Est-il si inconcevable qu’ils puissent dépenser des sommes folles pour des biens immatériels ? 

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Le jpeg  Everydays – The First 5000 Days vendu 69,3 millions de dollars par Christie’s en mars dernier. Un record qui a fait de Beeple le troisième artiste vivant le plus cher, derrière Jeff Koons et David Hockney. Screenshot par businessinsider

Évidemment, les symboles de statut social ne sont pas l’apanage des riches. Nous nous faisons tous plaisir d’une manière ou d’une autre, que ce soit en achetant une voiture neuve alors qu’un véhicule d’occasion ferait l’affaire, ou en s’offrant des vêtements de marques, des téléphones haut de gamme, etc.

Ce que la plupart des symboles de statut social ont en commun, c’est un public-cible spécifique. Le banquier qui arbore sa Rolex ou la directrice générale qui s’installe dans sa Bentley se moquent que l’on trouve l’un ou l’autre de ces achats excessifs. Ils les légitimisent auprès d’une catégorie sociale à laquelle nous n’appartenons pas et qui seule importe à leurs yeux. Il en va de même pour les NFT.

Dans le cas de Richerd, il dirige sa propre entreprise, Manifold, où il aide des artistes numériques comme Beeple à utiliser la blockchain pour faire de l’art qui ne peut exister que sous forme de NFT. Dans son cas, posséder un NFT valorisé à 9 millions de dollars est une formidable carte de visite dans le petit monde des grandes fortunes. 

Des problèmes bien réels

VIDEO: J'ai acheté cette image 1000€ (je vous explique pourquoi)
Léo Duff

Les NFT sont clivants. Un petit groupe de personnes croit en la technologie sous-jacente (des jetons qui certifient la propriété d’un bien numérique), mais beaucoup plus nombreux sont ceux qui la considèrent comme une escroquerie. Tout comme le second groupe a du mal à percevoir la valeur des NFT, le premier groupe peut parfois être sur la défensive quant aux imperfections de la technologie qui sont bien réelles.

Tout d’abord, il y a l’inaccessibilité. Il y a une raison pour laquelle les développeurs ont tendance à bien réussir dans le trading de crypto et de NFT : la mise en place de portefeuilles de blockchain et d’autres outils numériques nécessaires est complexe. Même le simple fait d’acheter et de vendre peut être périlleux. Envoyez de l’argent à la mauvaise adresse de portefeuille par accident, et il disparaît à jamais.

Et puis il y a les frais. Imaginez que vous souhaitiez vous lancer dans les NFT et que vous soyez prêt à investir 1 000 dollars. Si vous achetez un nouveau NFT lors d’une vente publique, vous dépenserez généralement entre 120 et 400 dollars. Ce n’est pas énorme. Mais il faut prendre en compte les frais de transaction. En effet, la plupart des NFT sont construits sur la blockchain ethereum, qui est souvent frappée de congestion. Plus il y a de personnes qui utilisent l’ethereum, que ce soit pour échanger des altcoins ou acheter des NFT, plus les frais sont élevés. Dans le meilleur des cas, vous dépenserez environ 100 dollars par transaction, mais le double ou le triple de ce montant est assez courant.

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4000$ de frais…pour une transaction qui a en plus échouée. Screenshot par Daniel Van Boom

Cette situation est particulièrement problématique pour les NFT. Il est possible pour 100 000 personnes d’acheter de la crypto shiba inu en même temps, puisqu’il y en a quatre milliards en circulation. Mais lorsque 10 000 personnes tentent d’acheter le même NFT, il en résulte un pic massif des coûts de transaction, car certains utilisateurs surenchérissent pour accélérer leur achat. Cela peut ne durer qu’une minute ou deux, mais les dégâts peuvent être considérables pendant ce laps de temps. Il n’est pas rare que des personnes dépensent plus de 10 000 dollars en frais de transaction. Il n’est pas rare non plus que des personnes perdent 4 000 dollars à cause d’une transaction ratée.

L’utilisation de l’Ethereum contribue également à l’autre critique majeure envers les NFT, à savoir la quantité massive d’énergie qu’ils consomment. Précisons que les NFT ne sont pas aussi mauvais pour l’environnement que l’Ethereum. L’année prochaine, les développeurs d’Ethereum sont également censés introduire une mise à niveau qui fera que le minage consommera 1 % de l’énergie qu’il utilise actuellement. Pour l’instant, personne ne peut dire précisément combien d’énergie consomme l’ethereum, mais nous savons que c’est beaucoup. Le Bitcoin est encore moins efficace que l’ethereum, ce qui explique pourquoi presque rien n’est construit sur sa blockchain.

Et enfin, il y a le fait que la plupart des personnes qui négocient des NFT le font pour faire du profit. Les arnaques sont partout, et les prix sont volatils. Un grand nombre des personnes qui créent, achètent et vendent des NFT sont ignorantes ou peu intéressées par cette technologie. Certains experts estiment qu’il s’agit d’une bulle étant donné que le nombre de spéculateurs dépasse celui des véritables créateurs.

Mais une bulle peut éclater et laisser quelque chose de mieux dans son sillage. L’art du pixel à sept chiffres n’est peut-être pas éternel, mais la preuve de la propriété numérique, qui est la véritable raison d’être des NFT, peut l’être.

Vers une grosse année NFT en 2022

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Personne ne sait ce que deviendront les NFT, et tous ceux qui prétendent le savoir essaient probablement de vous vendre quelque chose. Ce que nous pouvons dire, c’est que le nombre de personnes qui achètent des NFT est presque certainement sur le point d’augmenter.

On estime qu’environ 250 000 personnes échangent des NFT chaque mois sur OpenSea, la plus grande place de marché dédiée à cette technologie. CoinBase ouvrira bientôt sa propre place de marché NFT, pour laquelle 2 millions d’utilisateurs sont sur la liste d’attente. Robinhood a des projets similaires.

Plus important encore, de grandes entreprises qui gagnent déjà de l’argent en dehors de l’espace cryptographique veulent en être. Niantic, la société derrière Pokemon Go, vient d’annoncer un jeu dans lequel les joueurs peuvent gagner des bitcoins. Twitter et Meta prévoient d’intégrer les NFT à leurs plateformes tandis qu’Epic Games se dit ouvert également. Imaginez un monde où, au lieu d’acheter des skins dans Fortnite, vous achetiez un NFT pour ces skins que vous pourriez alors échanger contre des tenues et des armes dans d’autres jeux, ou vendre une fois que vous n’en voulez plus. Epic Games a annoncé qu’il n’intégrerait pas une telle mécanique dans Fortnite, mais cela n’empêchera peut-être pas des concurrents de le faire.

Selon Richerd, l’afflux de personnes qui entreront bientôt sur le marché des NFT va entrainer une plus grande diversité de produits numériques vendus à des publics différents. Vous ne dépenserez peut-être pas 200 euros, et encore moins 200 000 euros, pour une image de profil, mais vous serez peut-être prêt à débourser 10 euros pour un skin unique, ou pour un produit dans le futur métavers de Facebook

Article de CNET.com adapté par CNETFrance

Image : Richerd/OpenSea, Yuga Labs, Daniel Van Boom

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Author: Justin Rodriguez

Last Updated: 1704329522

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